vendredi 24 mai 2013

Only in France


Le 21 mai 2013, un homme s'est suicidé d'une balle dans la bouche dans Notre-Dame, devant un millier de touristes médusés.

Selon ses affidés et les médias, cet homme, Dominique Venner, intellectuel et essayiste d'extrême-droite, volontaire durant la guerre d'Algérie, proche de l'OAS, païen, et caetera, se serait donné la mort en signe de protestation politique contre la loi autorisant le mariage gay. Son geste est salué par Marine Lepen, qui y voit un "éveil des consciences".




Le lendemain, sur le parvis de la cathédrale, des gens se sont rassemblés dans un dernier hommage...




Pour quelle raison est-ce que je me sens mal à l'aise?
Qu'est-ce qui me gène exactement dans l'hommage rendu?

Des personnes, que l'on peut, sans trop exagérer, considérées comme proches du Front National, du Printemps français, et/ou de la manif pour tous, ont librement exprimé leur admiration pour un homme d'extrême-droite, farouche opposant aux droits à la fois des homosexuels et des immigrés. Ces gens sont ainsi venus saluer un homme dont le discours disait:  

"Je me donne la mort afin de réveiller les consciences assoupies. Je m'insurge contre la fatalité", contre "les désirs individuels qui détruisent nos ancrages identitaires et notamment la famille, socle intime de notre civilisation multimillénaire", ajoute Dominique Venner. "Alors que je défends l'identité de tous les peuples chez eux, je m'insurge aussi contre le crime visant au remplacement de nos populations"

Ces gens sont donc implicitement en accord avec ce discours.

Ceci prouve bien que nous vivons dans une démocratie et que nul ne peut être inquiété pour ses opinions ou ses sympathies. Nul? Vraiment?

Mais oublions Ramadan, et transposons la situation: imaginons que Venner se soit appelé Mahmoud, par exemple, imaginons qu'il ait été intellectuel et essayiste salafiste, qu'il ait combattu en Afghanistan, qu'il ait été proche de groupes politiques haineux et/ou terroristes. Mahmoud en a marre de ce qu'il appelle la décadence de la France, qui pour lui veut dire le mariage gay, et le fait que les musulmans ne prennent pas les armes pour bouter hors de France les "infidèles". Il trouve la menace islamiste trop lente, et veut agir. Il arrive devant l'autel de notre dame et se fait sauter la cervelle. Le lendemain, des fans viennent lui rendre hommage.

Pourrait-on imaginer que cela se produise en France? Evidemment non, bien sur que non, le périmètre aurait été bouclé, personne n'aurait été assez fou alors pour pointer son nez et saluer cette démence. Pas un politicien n'aurait osé rendre hommage à ce genre d'illuminé, tous se seraient évertués à dénoncer la menace islamiste dans une débauche de tweet et d'amalgames. Personne n'aurait trouvé normal de rendre "un dernier hommage", personne n'aurait trouvé pertinent d'écrire:

"Mahmoud appartenait à une race d’élite. Celle des hommes qui se sacrifient pour ce à quoi ils croient. Rien à voir avec les tueurs islamistes qui se suicident uniquement pour en entraîner d’autres dans la mort. Rien à voir non plus avec des kamikazes japonais qui acceptaient de mourir pour que meurent aussi leurs adversaires américains."

établissant ainsi une distinction entre un "intellectuel" des extrêmes, qui s'est donné la mort de manière spectaculaire, et un terroriste. Aurait-il été permis de faire cette différence entre un intellectuel des extrêmes et un "jihadiste", s'il avait été identifié comme musulman.
 
En effet, rien à voir entre une incitation à la haine et un appel à l'insurrection et les propos de Dominique Venner: "Il faudra certainement des gestes nouveaux, spectaculaires et symboliques pour ébranler les somnolences, secouer les consciences anesthésiées et réveiller la mémoire de nos origines".

Elle est là l'exception française: dans le refus de voir ce qui n'est qu'un autre visage, tout aussi terrifiant, du terrorisme.

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